Les dossiers de la reconstruction nous livrent les papiers à entête des artisans :
- M Chauvet : réfection de la Préfecture (peinture, vitrerie, dorure et décoration)
- J. Poutas : serrurerie d’art, porte en fer forgé
- Lefebvre et Théry : sculpture, remise à neuf de monuments
- Dendiével et Merlots : tôlerie, plomberie d’art
- Joseph Fagoo : peintre décorateur, frise artistique
- Fernand Volant : sculpteur
Ci-dessous : papier entête indiquant les nombreuses réalisations de l’entreprise Chauvet (décoration) dont à la Tour Eiffel.
Paul Vaast a sculpté la fontaine de la place Georges-Mulot à Paris. Il fut le collaborateur du sculpteur Almeras pour les travaux de sculpture décorative au Palais Législatif de Mexico. Il est l’auteur de nombreux Monuments aux Morts pour la France, membre du Comité régional des Arts appliqués de Rouen.
Il exécute à l’Hôtel de Ville les bases et les chapiteaux extérieurs de la partie Renaissance des premier et deuxième étages sur les trois façades sur cour, ainsi que les rosaces, moulures ornées et frise extérieure pour les trois étages.
Il est aussi l’auteur de nombreuses sculptures (églises, place du Marché-aux-Poissons)...
La sculpture du mur de fond de la place du Marché aux Poissons est confiée lors du Conseil Municipal du 22 août 1924 au sculpteur arrageois Paul Vaast.
Octave Bouchez (né en 1864 à Arras - 1939) était maître-marbrier. Émilien Bouchez (né en 1869 à Arras - 1915 ?),
conseiller municipal, était ferronnier et serrurier d’art.
Emilien Bouchez a créé la rampe en fer forgé (escalier de l’aile droite) de l’Hôtel de Ville.
Les grilles du chœur de l’église Saint-Nicolas-en-Cité sont d’Emilien Bouchez...
...ainsi que celles de l’église Saint-Jean-Baptiste.
Octave Bouchez a conçu les balustrades et la chaire à prêcher de l’église Saint-Jean-Baptiste...
...le dallage de la cathédrale.
La place Victor-Hugo
« Elle [la Commission des Travaux] vous propose aujourd’hui de rétablir en premier lieu sur la place Victor-Hugo le monument qui s’y trouvait édifié et de confier cette restauration à la maison Bouchez, à Arras, qui a construit le monument à l’origine et qui en détient les plans.
Cette restauration serait faite en granit belge de premier choix suivant plan ci-joint. Elle prévoit la pose au sommet du monument de la boule dorée surmontée d’une pointe qu’il comportait anciennement.
La dépense totale de 52.400 francs, envisagée suivant proposition détaillée de M. Bouchez, est couverte par dommages de guerre. » Conseil municipal du 2 mars 1929.
Le plan indique une hauteur totale d’environ 13 m 70.
Historique de la place Victor Hugo
Au cœur de la basse ville, la place Victor Hugo, à la forme octogonale d’un diamètre de 90 mètres et d’une superficie de 64 ares est typique de l’architecture du XVIIIe siècle.
La basse ville est construite sur le Pré Cagnon, une enclave marécageuse où serpente le Crinchon, entre l’esplanade de la Citadelle, les casernes Schramm et le rempart médiéval de la ville.
L’urbanisation de ce quartier est confiée à l’architecte Pierre-Louis Beffara. Le détournement du Crinchon est adopté en 1751 et les déblais provenant des vieux remparts et de la destruction de l’ancienne abbaye Saint-Vaast stabilisent et relèvent les sols de 18 pieds. Le premier et le plus vaste lotissement est atribué le 21 mai 1754, au Marquis de Beauffort. Les adjudicataires s’engagent à respecter le plan général et les clauses strictes imposées par l’échevinage.
Noblesse et bourgeoisie s’installent dans cet élégant quartier dont on apprécie les axes rectilignes convergeant vers cette place rehaussée, en 1779, d’une fontaine, réalisée par Félix Fruit et d’un obélisque dessiné par Prosteau.
La place sort engourdie de la Révolution française. Il faut attendre 1821 pour que le marché aux bestiaux anime le site. C’est aux bornes de grès et aux chaînes que les éleveurs attachent les vaches le samedi. Le nombre d’estaminets au début du XXe siècle laisse supposer l’effervescence de la place jusqu’à ce que le marché aux bestiaux soit transféré aux abattoirs vers 1950.
Source : Ville d’Arras.
Alphonse Gentil et François Eugène Bourdet
Ils travaillèrent en collaboration avec les plus grands architectes de leur époque. De nombreuses réalisations sont inscrites aujourd’hui à l’inventaire des Monuments Historiques.
rue du Petit Chaudron et place du Théâtre
Pierre Seguin (1872 - 1958) a travaillé pour l’opéra de Vichy, la basilique du Sacré-Cœur, le théâtre de Tunis. Il fut médaille d’or à l’Exposition universelle de 1900.
Il est l’auteur des panneaux de chêne sculpté de la Salle des fêtes de l’Hôtel de Ville. 1
La salle des fêtes de l’Hôtel de Ville représente la vie à Arras au XVIe siècle. Or, parmi les nombreux personnages qui composent les boiseries sculptées, se trouvent des intrus…. Nous les présentons ci-dessous.
1 - Voir le chapitre « Pierre Seguin, sculpteur ornemaniste » p. 91, du livre La salle des fêtes de l’Hôtel de Ville d’Arras, ASSEMCA, 2017
La modernité de l’automobile - La modernité du téléphone - La date de l’inauguration de l’Hôtel de Ville (1932) - Le cycliste : Désiré Delansorne, Maire d’Arras était marchand de cycles - La guerre 14 /18 - La date de l’armistice
L'Hôtel de Ville comporte deux autres marques de la modernité.
La Croix de guerre et la Légion d'honneur, décernés en 1919. Elles ornent la cheminée de la salle des fêtes.
Sur la façade principale. Dans cette archivolte à feuille de chou les deux combattants se menacent d’une grenade bâton. De quelle nationalité sont-ils ? Rien ne semble les différencier : vont-ils fraterniser ?
Pierre Seguin, sculpteur, est « chargé de travaux au Palais Saint-Vaast » (Conseil municipal du 21 mars 1924). Nous supposons qu’il s’agissait des sculptures du salon à l'italienne du Musée. (voir l'article "La reconstruction de l'abbaye Saint-Vaast")
Le Conseil Municipal du 21 mars 1924 décide la sculpture d’un motif décoratif avec armes de la Ville au groupe scolaire, rue du Saumon. Elle est l’œuvre de Pierre Seguin.
Groupe scolaire rue du Saumon, façade rue de Justice (Ecole Anatole France). Dusart et Loison (Paris), architectes, 1922 (source : archives municipales) - Ecole Anatole France, 23 rue de Justice, 2016
Les armoiries d’Arras à l’époque de la Reconstruction.
Au centre, le lion d’or, dressé sur ses pattes, farouche et triomphant, dont l’épaule est chargée de l’écu de l’Artois. Le blason est enrichi de la Croix de la Légion d’Honneur (à gauche) et de la Croix de Guerre de 1914 - 1918. « De gueules à un lion d’or, armé et lampassé d’azur, chargé en cœur d’un écusson d’azur semé de fleurs de lys d’or, au lambel de gueules de trois pendants, chaque pendant chargé de trois petits châteaux d’or, posés en pal l’un sur l’autre. » 1
1 - Armorial d’Artois et de Picardie, Duvauchelle P.
Raymond Subes, ferronnier d'art
Rayomd Subes (1891 - 1970) est un artiste-décorateur spécialisé en ferronnerie d'art.
Ancien élève de l’École Boulle et de l’École nationale supérieure des arts décoratifs, Raymond Subes est l'un des ferronniers d’art français les plus célèbres de la période Art déco. Toute sa carrière, jusqu'en 1970, il travaille dans l'entreprise d’Émile Robert associé à Ernest Borderel. Il y est d'abord dessinateur, puis directeur artistique et enfin directeur général.
Raymond Subes collabore avec les plus grands décorateurs de son époque : Jacques-Émile Ruhlmann, Léon et Maurice Jallot, Michel Roux-Spitz…
Il est élu membre de l’Académie des beaux-arts en 1958.
Il réalise les rampes d'escalier et les balustrades des paquebots Ile-de-France, Lafayette, L’Atlantique, Le Normandie ; les ferronneries de la Banque de France, du Palais de Tokyo, de grands hôtels parisiens. 1
Il crée le grand collier en or massif de l’ordre national de la Légion d’honneur, qui n’est porté que par le Président de la République.
Arras lui doit les grilles décorées du premier étage de l’Hôtel de Ville ainsi que les lustres et les plafonniers ; des ferronneries d’art de la cathédrale.
1 - source : Wikipédia - : Contenu soumis à la licence CC-BY-SA 3.0. Source : Article Raymond Subes de Wikipédia en français (auteurs)
Maurice Ringot fut un maître de la statuaire, un artiste capable de sculpter tous les styles : du classique gréco-romain appris aux Beaux-Arts au stylisé de ses derniers personnages, en passant par le néo-gothique, le romantique, le Modern style de la Belle Epoque.
Une partie des œuvres de Maurice Ringot fut malheureusement détruite durant la Seconde Guerre mondiale, mais elles subsistent encore aujourd’hui, entre autres, pour ne citer que quelques villes à Bergues - sa ville natale - Rosendaël, Malo, Dunkerque, Lille. 1
1 - source : Wikipédia - Contenu soumis à la licence CC-BY-SA 3.0. Source : Article Maurice Ringot de Wikipédia en français (auteurs)
Nous dépassons ici le cadre temporel de la Grande Reconstruction, puisque l'édifice sis rue Ernestale et rue des Jésuites a été construit en 1939. Cependant, ses sculptures méritent d'être présentées.
Elles seraient 1 l’œuvre de Henri Lagriffoul (1907 - 1981), auteur de la face de la pièce de monnaie de 5, 10 et 20 centimes de franc, avec le profil de Marianne.
1 - Selon Hélène Portiglia, ancienne conservatrice du Musée des Beaux-Arts d’Arras
Têtes en saillie en demie-bosse (sculpture à forte saillie adossée à un mur)
Ci-dessus : vue de la salle de présentation des toiles de Gustave Louis Jaulmes (1937). Située entre la cour du puits et la cour du cloître, la salle monumentale est créée par Pierre Paquet en 1928. Réalisées pour la salle à manger de l'Exposition des Arts décoratifs et industriels de 1925, sept toiles de Gustave Louis Jaulmes (1873 - 1959) sont installées au mur. Elles représentent les mois d'avril à octobre sur un mode allégorique. Jaulmes est également chargé du décor de la salle des mariages de l'Hôtel de Ville sur le thème du printemps. (voir article : la reconstruction de l'Hôtel de Ville et du beffroi)
Quelques repères.
Charles Hoffbauer (1875 – 1957) est un peintre français naturalisé américain. Peintre prolifique, il est connu pour ses peintures murales et ses tableaux historiques, ainsi que ses scènes de rue impressionnistes de la ville de New York.
Hoffbauer effectue son premier voyage transatlantique vers les États-Unis en 1909.
La carrière artistique de Hoffbauer connait plusieurs moments forts en 1912 : outre le succès de son exposition personnelle aux Galeries Knoedler, l'artiste choisit de reprendre le Triomphe d'un Condottiere, œuvre qui lui avait valu le Prix du Salon six ans plus tôt. L'œuvre retravaillée rencontre un grand succès lorsqu'elle est exposée cette année-là à l'Architectural League de New York, et Hoffbauer reçoit une commande pour les peintures murales du Confederate Memorial Institute de Richmond, en Virginie. En 1914, ce travail sur les peintures murales de Richmond est interrompu par la Première Guerre mondiale ; l'artiste se porte volontaire pour son pays et passe les quatre années suivantes à servir sur le front de la Somme et à travailler comme peintre de guerre officiel.
Il retourne aux États-Unis en 1919, reprend et termine les peintures murales de Richmond un an plus tard.
En 1923, l'hôtel des Invalides lui commande des décors pour la salle d'honneur, pour lesquels il recevra le prix de l'Institut de France en 1924.
En 1935, la carrière d'Hoffbauer aborde un tournant ; après avoir vu un film de Walt Disney, il est inspiré par le cinéma d'animation ; considérant que les États-Unis offrent le plus grand potentiel dans ce domaine, Hoffbauer décide en 1936 de s'installer à New York ; puis à Hollywood en 1939. Deux ans plus tard, le 26 décembre 1941, l'artiste est naturalisé américain à Los Angeles.
Hoffbauer quitte la Californie en 1953, année au cours de laquelle, il est élu membre correspondant de l'Institut de France, et s'installe à Rockport dans le Massachusetts, où il réside jusqu'à sa mort en 1957. 1
1 - source : Wikipédia - Contenu soumis à la licence CC-BY-SA 3.0. Source : Article Charles Hoffbauer de Wikipédia en français (auteurs)
La toile marouflée de la salle des fêtes de l’Hôtel de Ville
Charles Hoffbauer peint son œuvre dans une église désaffectée dans les environs de Paris, durant une année, en 1931 et 1932. Son ensemble décoratif met en scène environ 800 personnages et 170 monuments et habitations sur une surface de 240m2. Charles Hoffbauer évoque la vie quotidienne des Arrageois au XVIe siècle (le cortège des échevins, la procession épiscopale, le marché, la kermesse, la vie domestique, les métiers).
Nous voyons dans cette fresque qui puise dans les tableaux du maître Pieter Brueghel l'Ancien une allégorie de la renaissance de la ville martyre.
Le marouflage : consiste à fixer une toile sur un support à l'aide d'une colle forte dite maroufle qui durcit en séchant. C'est une opération particulièrement utilisée en peinture d'art.
ci-dessous : courrier de Charles Hoffbauer à Désiré Delansorne, maire d'Arras, par lequel nous apprenons que les peintures seront présentées à Paris à l’École des Beaux-Arts du 19 au 26 juillet 1932 ; Paul Léon, Directeur général des Beaux-Arts assistera à l'inauguration. Les peintures seront expédiées à Arras dès le 28 juillet. Le marouflage durera environ 15 jours.
ci-dessous : journal Le Temps, 21 juillet 1932
ci-dessous : détail de la toile marouflée de la salle des fêtes, le peintre à la Renaissance selon Hoffbauer
Description détaillée de la toile marouflée : livre La Salle des fêtes de l’Hôtel de Ville d’Arras, Dominique Coclet, Jacques Coclet, Agnès Devulder, Alain Nolibos, Frédéric Turner, ASSEMCA, 2017.
Voir aussi La toile marouflée de Charles Hoffbauer sur ce site.
Les dessins de la guerre 14 - 18
L'architecte et l'artisan d'art : regard sur deux maisons
23 place du Théâtre et rue du Petit-Chaudron (actuellement boulangerie Hermand), le premier plan de l’architecte Ray représente de manière très détaillée les ornements. Les céramiques actuelles ne figurent pas sur le plan de composition classique signé par Georges Trassoudaine et Jules Déprez.
Nous remarquons sur ce dernier plan d’élévation l’absence d’indications quant aux ornements. Les céramiques actuelles sont l’œuvre d’Alphonse Gentil et de François Eugène Bourdet. Cependant, elles viennent s’apposer sur des carreaux plats que l’on peut attribuer à l’architecte Georges Trassoudaine. En effet, il signe certaines de ses réalisations de ces carreaux de deux couleurs. Seuls les carreaux de céramique de Georges Trassoudaine ornent la façade latérale rue du Petit-Caudron.
Les ornements du 10 rue Saint-Aubert ne figurent pas sur le plan d’élévation (hormis les pilastres cannelés). Il n’est pas signé, mais nous supposons qu’il a été dessiné par René Trubert dont un courrier à entête est conservé dans le dossier d’autorisation de construire. Il nous renseigne sur son titre : ingénieur des Arts et Manufactures. Sa signature de façade au 50 rue Saint-Aubert nous apprend qu’il a été formé à l’École Centrale de Paris.
Ce magnifique bas-relief avant-gardiste représente une liseuse, une femme émancipée, coiffée à la garçonne, portant une tenue légère… Les hommes mobilisés durant la Première guerre mondiale, la femme occupe de nouveaux postes à responsabilité… et lit ! (les femmes peuvent passer le baccalauréat en 1924).
10 rue Saint-Aubert, H Cauvet, librairie papeterie, livres classiques. René Trubert, architecte, 1928
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